La flottille

Verdun
Portrait
Propriétaire Philippe Antoine
Construction Roger Servain
Année de lancement : 1946
Longueur 3,60 mètres
Misaine cachou – Sans foc – Double liston vert
Anémone
Portrait
Propriétaire Amerami
Exploitants E. Gebhardt et A. Vaillant
Construction Roger Servain
Année de lancement : 1952
Longueur 4,20 mètres
Misaine bleue – Foc blanc – Liston bleu

La Germaine
Portrait
Propriétaire famille Postel
Construction Jean Huon
Année de lancement : 1954
Longueur 4,20 mètres
Misaine bleue – Foc rouge – Liston bleu
Fortune
Portrait
Propriétaires Florence Eve, Michèle Lelièvre et Claire Vaillant
Construction Roger Servain
Année de lancement : 1957
Longueur 4,20 mètres
Misaine rouge – Foc rouge – Double liston rouge
Zig-Zag
Portrait
Propriétaire famille Pichard
Construction Roger Servain
Année de lancement : 1957
Longueur 4,20 mètres
Misaine cachou – Foc bleu clair – Double liston bleu clair
Triple Sec
Portrait
Propriétaires Gilbert Hurel et Pascal Hurel
Construction Roger Servain
Année de lancement : 1964
Longueur 4,20 mètres
Misaine blanche – Foc jaune – Liston jaune

Sud
Portrait
Propriétaires Christophe Hurel, Guillaume Hurel, Sébastien Hurel
Construction Roger Servain
Année de lancement : 1968
Longueur 4,20 mètres
Misaine blanche – Foc rouge – Liston bordeaux

Saphir des Iles
Portrait
Propriétaire famille De Joybert
Construction Jean-Claude Servain
Année de lancement : 1977
Longueur 4,20 mètres
Misaine bleue – Foc blanc – Double liston bleu

La Petite Mauvaise
Portrait
Propriétaire Hervé Hillard
Construction Pierrot Legueltel
Année de lancement : 1989
Longueur 4,20 mètres
Misaine brique – Foc rouge – Liston bleu

Fanfaron
Portrait
Propriétaire Xavier Henriet
Construction Pierrot Legueltel
Année de lancement : 2001
Longueur 4,20 mètres
Misaine blanche – Foc ocre – Liston brun

Jolie Brise
Portrait
Propriétaire Jean-Michel Thévenin
Construction Pierrot Legueltel
Année de lancement : 2001
Longueur 4,20 mètres
Misaine noire – Foc noir – Liston noir
L’Almaca
Portrait
Propriétaires Sophie et Frédéric Chancerel
Construction Camille Gaboriau
Année de lancement : 2006
Longueur 4,20 mètres
Misaine cachou – Foc blanc – Double liston brique
Dream
Portrait
Propriétaires Agnès et Antoine Hurel
Construction Antoine Hurel
Année de lancement : 2010
Longueur 4,20 mètres
Misaine blanche – Foc vert d’eau – Liston bleu-vert
Barr-Avel
Portrait
Propriétaire Camille Gaboriau
Construction Camille Gaboriau
Année de lancement : 2013
Longueur 4,20 mètres
Misaine blanche – Foc brique – Liston brique
Le Loup
Portrait
Propriétaire famille Gourreau
Construction Antoine Hurel
Année de lancement : 2014
Longueur 4,20 mètres
Misaine blanche – Foc orange – Liston orange
Portraits
Triple Sec
Au moment où j’écris ces lignes, le Triple Sec a exactement 50 ans. C’est un des plus anciens canots chausiais actuellement existants, puisqu’il arrive chronologiquement en 5ème position, derrière Verdun, Anémone, Zig-Zag et Fortune.
Les origines :
Le Triple Sec a été construit en 1964 par Roger Servain, chantier naval à Granville, pour son premier propriétaire, Jean-Claude Rossignol : construction très soignée, bordés en orme dans les fonds, en sapin rouge du nord dans les hauts, le tout riveté cuivre sur membrures acacia. Roger Servain, était réputé pour le fini irréprochable de ses bateaux, ce qui explique en partie l’exceptionnelle longévité de nos petits canots.
Quelques années plus tard, en 1969, Jean-Claude Rossignol me confia le Triple Sec dans le cadre d’un accord « entretien contre usage » qui nous convenait à tous les deux : je prenais en charge les travaux d’entretien du bateau, Jean-Claude en échange m’en laissait la jouissance quand il ne s’en servait pas.

L’arrangement me satisfaisait car, malgré mon ardent désir de posséder un canot, j’aurais été à l’époque bien incapable de m’en offrir un. Par ailleurs étant sur place, il m’était facile de m’occuper de l’hivernage et des peintures annuelles du Triple Sec : j’étais alors étudiant en droit à la fac de Caen, où je m’ennuyais ferme, et l’entretien du canot me fournissait un dérivatif salutaire (je me souviens encore des heures passées à recoudre la grand-voile au lieu de réviser mes exams…)

Cet arrangement « gagnant-gagnant » fonctionna très bien pendant plusieurs années. Aussi quand Jean-Claude décida de se séparer du canot, au milieu des années 1970, c’est tout naturellement qu’il se tourna vers moi pour m’en proposer la vente. J’étais bien sûr intéressé, mais comme je n’étais guère plus argenté qu’à l’époque où j’étais étudiant, je m’associai avec mon frère Pascal pour pouvoir conclure l’affaire. Pascal rentrait d’un long séjour au Canada et souhaitait transmettre à ses tout jeunes enfants notre goût commun pour les canots chausiais et la navigation dans l’archipel. Nous nous mîmes donc d’accord sur un partage 50/50 du Triple Sec, et cette copropriété a harmonieusement fonctionné jusqu’à nos jours.
Le grand radoub de l’an 2000 :
À la fin des années 1990, le Triple Sec commençait à donner de sérieux signes de fatigue. Il faisait de l’eau par la râblure et nous avions décelé plusieurs points de faiblesse dans sa structure : membrures bouillies cassées, bordés d’échouage fatigués, pourriture dans certains abouts de bordés… Il était temps d’agir ! Nous avons donc ramené le canot à Granville au cours de l’hiver 2001/2002 pour lui faire subir un grand radoub au chantier Anfray. Après mise à nu de la coque, les membrures ont été doublées, les bordés de râblure recloués, les bordés d’échouage remplacés et toutes les parties douteuses (abouts de bordés, une partie du tableau arrière et du pontage) vérifiées et changées : Claude Anfray, qui était encore en activité à cette époque, a fait un véritable travail d’orfèvre ! Nous avons profité de ce grand carénage pour avancer le mât de 20 cm, ce qui nous a permis d’augmenter la taille de la grand-voile sans modifier l’équilibre vélique du canot.

La suite du programme :
Lorsque nous nous sommes associés, Pascal et moi, pour reprendre le Triple Sec, notre idée était bien sûr d’en profiter un maximum pour notre usage personnel (ce que nous n’avons pas manqué de faire), mais aussi de l’utiliser comme outil pédagogique pour initier à la navigation les nouveaux moussaillons de la famille… et ça a superbement marché : nos enfants sont tous passés par l’école « Triple Sec » dès leur plus jeune âge, et sont devenus eux-aussi, pour notre plus grand bonheur, des passionnés de ces petits bateaux.


Christophe, Guillaume et Sébastien, les trois fils de Pascal se sont mis ensemble pour racheter le Sud à Antoine, leur oncle, Alexandre s’est associé avec ses amis Marc et Charles pour acquérir le Petit Bonhomme et enfin nos trois filles et nièces, Marion, Amélie et Emma, s’investissent à fond dans le Triple Sec, si bien que notre intention est maintenant de leur donner ce canot dont elles s’occupent avec tant d’enthousiasme et de compétence.

Gilbert Hurel
Sud
Le Sud a été construit en 1968 par Roger Servain. C’est donc le sixième canot chausiais directement sorti des mains de son concepteur. C’est également le dernier, puisque le canot suivant (le Sipierre, rebaptisé par la suite Saphir, puis Saphir des Iles) sera construit par son fils Jean-Claude, qui lui succèdera à la tête du chantier après son départ à la retraite.
Le premier propriétaire du canot, Émile Potrel, en avait commandé la construction pour l’offrir à sa belle-fille, Marie-Jeanne Chataignier, qui l’avait alors baptisé Filo. Le bateau disparaît ensuite des écrans radars chausiais. On sait seulement que Marie-Jeanne, étudiante à Caen, l’a emmené sur la côte du Calvados et qu’il y est probablement resté.
Ce n’est que bien plus tard, en 1987, qu’Antoine Hurel retrouve par hasard sa trace en se promenant sur le port de Courseulles : il remarque, stocké à terre au chantier Bigotto, un petit bateau qui ressemble furieusement à un canot chausiais. La coque est en triste état (plus une trace de peinture et l’herbe qui pousse à travers les bordés), mais elle semble à peu près intacte. Renseignements pris auprès du chantier, il s’avère que le bateau a été gruté hors de l’eau après avoir coulé dans le port, puis racheté à ses anciens propriétaires par une association locale de sauvegarde du patrimoine maritime, le Verguillon. Cette association, créée en 1981 sous l’impulsion de François Renault, n’a pas les moyens à l’époque d’entreprendre la restauration du canot. Antoine propose alors à son président, Olivier Oudry, de racheter l’épave en l’état, avec l’idée de réaliser lui-même les travaux et de ramener le Filo dans ses eaux d’origine. L’affaire est conclue en avril 1987 pour un montant de 3500 francs.
Antoine a les moyens de ses ambitions : menuisier de formation, il a créé une entreprise d’entretien de bateaux à Granville. Il a donc toute la compétence et l’équipement nécessaire pour mener le projet à bien. Le canot toutefois est dans un tel état qu’il lui faudra deux ans, en travaillant sur son temps libre, pour en achever la restauration : doublage ou remplacement des membrures, remplacement d’une bonne partie des bordés, du tableau arrière et de l’intégralité du pontage, fabrication du mât et des espars : la tâche est considérable, mais c’est un bateau quasiment neuf qui ressort du chantier au printemps 1989. Antoine le rebaptise Sud, en souvenir d’un voyage qu’il a récemment effectué sous les tropiques.

De retour dans les eaux chausiaises, le Sud s’illustre en gagnant pas mal de régates. C’est un bateau rapide et bien mené. Antoine est un régatier pugnace, ce n’est un secret pour personne, et il sait faire marcher un voilier ! Mais il a d’autres idées en tête. Depuis quelques années, il s’est spécialisé dans la réparation des bateaux en polyester et il ambitionne de fabriquer un moule pour sortir un canot dans ce nouveau matériau : une révolution dans le petit monde des canots chausiais…

Pour mener à bien son projet, il doit se séparer du Sud : on a beau aimer les canots, on ne peut tout de même pas les collectionner comme des petites autos ! Son neveu Christophe (un ancien moussaillon du Triple Sec qui a depuis acquis ses galons de commandant dans la marine marchande) est intéressé. En 2006, il s’associe avec sa cousine Kelly Goldsborough pour racheter le Sud à Antoine. C’est à ce moment que le canot prend ses couleurs actuelles : liston bordeaux, voile blanche, foc rouge. Deux ans plus tard, Kelly revendra ses parts aux frères de Christophe, Guillaume et Sébastien. Le destin du Sud est donc désormais entre les mains des trois frères Hurel. Nul doute qu’ils sauront écrire la suite de l’histoire.
